La céphalée hypnique
La céphalée hypnique est un syndrome rare qui survient exclusivement pendant le sommeil, généralement à la même heure chaque nuit. Elle est considérée comme une céphalée primaire, c’est-à-dire qu’elle n’est pas liée ni causée par une autre maladie, selon la classification internationale des céphalées ou ICHD-3.
RÉCURRENCE DANS LA POPULATION
On estime que les céphalées hypniques représentent environ 0,07 % de l’ensemble des patients se présentant chez leur professionnel de santé avec des céphalées. Chez les personnes âgées, le ratio passe à 1,4 % selon une étude italienne. Toutefois, ces dernières années, on pense que les céphalées sont légèrement plus fréquentes qu’auparavant. Une étude française estime plutôt entre 0,3 % et 0,6 % les patients se plaignant d’une migraine qui seront diagnostiqués souffrants de céphalées hypniques.
FRÉQUENCE ET SYMPTÔMES
Les caractéristiques des céphalées hypniques sont les suivantes :
- Le moment – La céphalée survient généralement exclusivement pendant le sommeil à rythme circadien et réveille la personne qui en souffre. Le rythme circadien est en quelque sorte l’horloge du corps humain et définit un cycle de 24 heures alternant entre sommeil et alimentation.
- L’âge – Bien qu’il s’agisse d’une maladie qui atteint plus particulièrement les personnes âgées (>50 ans), elle a également été signalée chez des patients jeunes.
- Le sexe – Ce trouble semble toucher indifféremment les hommes et les femmes.
- La durée – Ces maux de tête sont généralement de courte durée (30 à 60 minutes) mais peuvent durer jusqu’à 4 heures.
- La fréquence – Au moins 15 crises par mois.
- L’intensité – Généralement modérée à sévère, elle peut aussi être décrite comme légère dans certains cas rares.
- Le type de douleur – La douleur est vive, mais peut aussi être décrite comme lancinante ou pulsatile.
- La localisation – Le plus souvent bilatérale (des deux côtés de la tête) et diffuse.
- Autres caractéristiques associées – Ces céphalées sont rarement associées à des symptômes migraineux (nausées / vomissements ou photophobie / phonophobie) ou à un larmoiement de l’œil.
DIAGNOSTIC ET PRISE EN CHARGE
Les céphalées hypniques sont rares et ne doivent être diagnostiquées qu’après avoir exclu d’autres causes via une évaluation minutieuse par le médecin, afin de s’assurer qu’il n’existe pas de causes secondaires pouvant causer la céphalée.
En effet, d’autres maladies ou troubles peuvent causer des céphalées survenant pendant le sommeil. Il peut s’agir, par exemple, d’un trouble intracrânien entraînant une pression intracrânienne élevée, d’une apnée du sommeil, d’une hypertension artérielle nocturne, d’une hypoglycémie nocturne ou d’un sevrage médicamenteux. Le médecin s’assurera aussi que le patient ne souffre pas d’un autre trouble primaire des céphalées susceptible d’imiter les céphalées hypniques. Par exemple, l’algie vasculaire de la face et les migraines sont des céphalées primaires qui peuvent survenir pendant le sommeil.
L’IRM cérébrale avec ou sans contraste est nécessaire afin d’exclure toute anomalie structurelle comme une tumeur par exemple. Elle peut également montrer une réduction du volume de la matière grise dans l’hypothalamus comme étant responsable de la douleur ressentie. Une polysomnographie (étude du sommeil) de nuit peut aussi s’avérer utile afin d’exclure les troubles du sommeil.
Après avoir écarté d’autres pathologies, les critères formels pour diagnostiquer les céphalées hypniques ont été établis par l’ICHD-3 et exigent que les céphalées :
(1) se développent uniquement pendant le sommeil et provoquent le réveil,
(2) surviennent +/- 10 jours par mois, pendant +/- 3 mois,
(3) durent de 15 minutes à 4 heures après le réveil,
(4) et ne soient pas associées à des symptômes crâniens ou à de l’agitation.
En outre, la céphalée ne doit pas être expliquée par un autre diagnostic ICHD-3.
TRAITEMENTS EXISTANTS
- En première intention, l’administration de 40 à 60 mg de caféine au coucher est le traitement le plus couramment utilisé dans les céphalées hypniques. La caféine est également très bien tolérée par les personnes âgées et, étonnamment, n’interfère pas avec le sommeil.
- L’indométacine a donné des résultats positifs dans la prise en charge des céphalées hypniques. La dose habituelle pour le traitement est de 25 à 150 mg au coucher. Le médecin doit être attentif aux effets secondaires lorsqu’il prescrit le médicament à des personnes âgées.
- Le lithium – Raskin et al. (nombreux co-auteurs) a publié les premiers rapports sur l’efficacité du lithium dans le traitement des céphalées. Plusieurs autres études ont été publiées depuis, corroborant leurs résultats. La dose efficace varie de 150 à 600 mg / jour en dose unique ou fractionnée. Ce médicament doit être utilisé avec prudence, en particulier en cas de maladie rénale, de maladie thyroïdienne, de déshydratation ou d’utilisation de diurétiques.
- Parmi les autres médicaments, jugés inefficaces mais dont les preuves sont contradictoires, figurent : les antidépresseurs tricycliques, la flunarizine, les bêtabloquants, le vérapamil, les AINS, la prednisolone, d’autres anticonvulsivants, l’acétazolamide, la mélatonine, les benzodiazépines, le pizotifène et le topiramate. Certaines études de cas ont en effet montré que l’utilisation préventive quotidienne du topiramate était efficace.
PRONOSTIC
Il a été rapporté qu’environ 17 % des patients obtiennent un soulagement voire une rémission au fil du temps. Cependant, la plupart des patients continuent à en souffrir de manière chronique. Une étude a rapporté que 40 % des patients parviennent à se libérer de ces maux de tête grâce à un traitement. Dans une autre étude publiée, 53 % des patients deviennent épisodiques après le traitement.
Pour lever le doute, établir un diagnostic et mettre en place un traitement, une seule solution : consulter votre médecin.
Résumé et traduit de l’anglais Morgane Rivera Vargas, bénévole à l’association La Voix des Migraineux et traductrice professionnelle.
Sources :
American Migraine Foundation, Hypnic Headache. Yasir Al Khalili – Pooja Chopra. January 2017
https://americanmigrainefoundation.org/resource-library/hypnic-headache/
National library of Medicine, Hypnic Headache. April 2023
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK557598/
Classification Internationale des Céphalées IHS pour la migraine hypnique :
https://ichd-3.org/other-primary-headache-disorders/4-9-hypnic-headache/
Version française : https://ichd-3.org/wp-content/uploads/2019/06/ICHD3-traduction-française-VF-à-publier.pdf
Étude italienne : Hypnic headache. Holle D, Naegel S, Obermann M. Cephalalgia. 2013 Dec;33(16):1349-57
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/23832130/
Étude française : A consecutive series of 22 cases of hypnic headache in France. Donnet A, Lantéri-Minet M. Cephalalgia. 2009 Sep;29(9):928-34
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19250282/
Études de cas : Hypnic headache: clinical features, pathophysiology, and treatment. Evers S, Goadsby PJ. Neurology. 2003 Mar 25;60(6):905-9
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/12654950/
Études de cas sur les traitements : Carbamazepine Toxicity. Al Khalili Y, Sekhon S, Jain S. StatPearls [Internet]. StatPearls Publishing; Treasure Island (FL): Jul 24, 2023.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/29939629/
Mis en ligne le 3 mai 2024.