Histoires & Poèmes

plume

J’ai volé mon âme à un clown,
Joueur de tam-tam, fan de techno,
Amateur de bête-rave.
Il a enfermé ma tête
Dans un vice sans fin,
Un laminoir, une boîte noire.
Mon oeil s’est kaléidoscopé,
Mes mots se sont télescopés,
Mes mains sont devenues gauchères.
Mes muscles ont joué au tétanos,
Les uns après autres, ils ont dansé.
La nausée s’en est mêlée.
Le clown-plante a étendu ses lianes.
Dans tous les interstices, elles sont entrées.
Mon corps a répondu aux abonnés  absents,
Mon esprit a lâché la barre au milieu de la tempête.
J’ai éclaté en mille morceaux.
Le clown-cannibale m’a volé un peu de ma vie
Et s’il prend la relève,
Si le puzzle ne se reconstruit pas,
Coupez-moi la tête.

CLAIRE

UNE CRISE

D’abord insignifiante
Puis de plus en plus présente
Comme un serpent qui glisse
Du plus profond de tes abysses
Du côté gauche du côté droit 
Elle prend tous ses droits
Dans les recoins de ton cerveau
Des dizaines de coups de marteaux 
Dans ton œil un pic à glace
Vient de se faire une place
La lumière t’éblouit
Le bruit est ton ennemi
Ta vie devient misérable
Ta propre existence insupportable 
Tu pries pour que ça s’arrête
Car la dépression te guette
Toi si aimée, si joyeuse
Si sportive, si heureuse 
Tu attends avec impatience 
Le repos de ta conscience
Le salvateur triptan 
Ou le triple temps 
Qui viendra te soulager enfin
De ces souffrances sans fin
Et puis le calme revient 
Ton cerveau à nouveau serein
Pour quelques heures
Ou quelques jours 
Avant son prochain mauvais tour.


Mon Ennemi Invisible

Ma vie sans toi, c’est quoi ?
Ma vie sans toi n’est que bonheur et joie de vivre, amour et plaisir.
J’aime la vie et ce qu’elle m’apporte. Le bonheur est autour de moi car je le choisis.
Les épreuves me rendent plus forte et plus reconnaissante, chaque jour, d’être là où je suis.
Toutes les épreuves, sauf toi ! Toi, Mon Ennemi Invisible…
Toi qui arrives sans crier gare.
Toi qui te faufiles en moi de plus en plus souvent.
Toi qui, vicieux comme tu es, agis sous plusieurs formes pour m’empêcher de te décrire, pour m’empêcher de te chasser, pour m’empêcher d’avancer. 
Tantôt, tu m’enserres la tête, tel un étau,
Parfois, tu m’imposes cette charge lourde sur les épaules,
Souvent, tu enfonces tes poings dans mes yeux, tellement fort, que je ne peux lutter.
Le plus difficile à gérer n’est pas de souffrir beaucoup mais de souffrir toujours. De me réveiller chaque matin avec comme unique question « Es-tu là?
Chaque projet, chaque envie, chaque action, chaque décision est concomitante à ta présence. 
Tu pèses sur moi tel un boulet à la cheville.
J’ai l’impression de ne parler que de toi alors que mon seul souhait est que tu disparaisses. 
Tu m’empêches de vivre et de rire. Tu me prends mes souvenirs.
Tu m’as pris 2 jours à Majorque, 3 jours à Marseille. Et, combien de week-ends, voire de semaines, avec mes filles, mon amoureux, ma famille, mes amis. 
Tu m’empêches de réaliser mes projets, de bricoler chez moi avec plaisir, d’évoluer professionnellement sereinement.
Tu m’empêches d’être moi…
Tu ne m’autorises aucun excès : interdit les soirées trop arrosées, les nuits trop courtes, le chahut, le trop plein de stress.
Tu dresses devant moi une ligne à ne pas dépasser. 
La peur m’anime… Celle, que tu gâches une journée de plus dans une vie déjà beaucoup trop courte.
Lorsque tu apparais, tu m’enfermes dans une spirale dangereuse où tout devient sombre et négatif. Tu encres en moi, des idées noires, moi qui ne suis que vie et bonheur. Tu me transformes, me pourris la vie.
Je te déteste autant que tu m’envahis. 
Je te crie ma colère et ma haine, 
Oh toi, Mon Ennemi Invisible…


Le mal a dit.

Elle est là, elle rôde !
Elle attend le meilleur moment pour se lancer.
Rien ne sert de se presser, quand les turbines sont lancées, peu importe la vitesse, le résultat sera le même !
La course peut durer des heures mais je finirai vaincue, je le sais !
Chaque détail avant-coureur compte, j’ai appris à les repérer.
Ils sont là pour me faire peur et ça fonctionne, à chaque fois.
Ça débute toujours par des picotements : premier cran !
Ensuite la perte de mémoire, des mots : deuxième cran !
Et puis viens la tache : dernier cran avant le lancement du Grand Huit !
Plus rien ne viendra arrêter la torture, lente et sournoise. J’ai beau essayer de la tromper, d’user et abuser de stratèges, rien n’y fait, je ne peux que succomber.
Coule en moi ce mauvais œil, celui qui un jour t’arrête en plein élan et te met K-O.
La première fois je n’étais pas la bonne destinataire, c’est obligé. J’ai pensé y échapper ensuite, que ce n’était qu’un malentendu, mais au fond de moi je savais que le doute n’était plus permis, elle était là pour moi et pour longtemps.
Chaque fois que j’ai voulu la contrer elle est revenue encore plus forte et encore plus machiavélique.
Rien ne m’en débarrassera sinon la fin, mortelle évidemment !
Ça c’est au plus fort de la crise. Le pic atteint, la pression redescend, les engrenages ralentissent leur vitesse et me laissent espérer un peu de répit. Je garde la méfiance en moi comme une seconde nature, je connais les effets boomerang de ces machines qui une fois arrêtées veulent plus fort que tout repartir, allez encore un peu d’adrénaline, laisse-moi encore te montrer de quoi je suis capable !
Et puis enfin appuyer sur l’interrupteur et laisser l’esprit divaguer, la chimie opère et m’entraîne dans les fins fonds abyssaux de mon âme.
Là où se trouve mes derniers retranchements, ceux dans lesquels je me sens finalement si bien…pourquoi ne pas plonger et y rester ? En ressortirais-je vivante ?
Oui, bien sûr, le cerveau n’a pas encore donné toutes ses capacités… les crises l’amenuisent, c’est de l’infiniment petit mais chaque fois il entame un peu de la lumière pour y glisser du noir.
Mais, si un jour les rouages n’étaient plus huilés, si les émotions ne rentraient pas dans cette course folle et que je laissais de côté ce mécanisme sombre et méchant pour regarder ailleurs ?
Et si j’entrais en résistance ? Si je préférais la lumière et que plus fort que tout je voulais la faire entrer ?
Et si j’empruntais cette petite porte pour voir ce qui se cache derrière ?
Le nouveau monde est peut-être en préparation pour moi, qui sait !
Et si je sortais gagnante de cette bataille ?
La victoire est sûrement à portée de main…
Allez au diable les tourments de mon cerveau vous n’aurez pas ma peau, pas cette fois-ci encore !

VIOLAINE


La stratégie du matin.

Il est 6h00 le réveil sonne.
Le rythme du matin démarre.
Le ptit dej, les repas du midi, lever les enfants….
Et puis 2 min de répit en buvant un café… ELLE est là… en fait ELLE est là depuis mon réveil… je ne m’en aperçois même plus… ELLE fait partie de moi.
Arrive le moment où la douleur se fait plus difficile… les questions s’enchaînent…
Va-t-ELLE me paralyser ?
Puis-je aller travailler ?
Vais-je loin aujourd’hui ?
Mon mari est-il joignable aujourd’hui ?

La stratégie du matin
Tout se calcule depuis des années
Rester à la maison se reposer et LA laisser gagner
Aller travailler en prenant le risque de ne pas pouvoir revenir

De toute façon, je devrais récupérer mes heures ratées, personne ne fait mon travail quand je suis absente…
Alors autant tenter…

La stratégie du matin consiste à peser le risque, le degré d’importance que je vais accorder à ma souffrance.

Et très souvent je suis maltraitante envers moi même

JUSTINE


La migraine

Elle frappe d’un côté de la tête
Comme un tambour qui s’entête

Elle arrive sans invitation
Au boulot ou à la maison

Elle nous prive de la lumière
Et nous met souvent en colère

Elle nous donne la nausée
Et nous empêche de bouger

Car au moindre mouvement
Elle s’amplifie intensément

Souvent elle est incomprise
Car peu connue on la méprise

Pourtant elle est douloureuse
Et peut être très vicieuse
Alors changeons les mentalités
Ensemble on peut avancer
Afin un jour de trouver
Le remède pour nous soulager.

LAETITIA


Que le spectacle commence.
On vous promet des sensations fortes.

Les voix baissent doucement…
Il faut aller aux toilettes avant le début,
Oui mais ma vessie ne veut plus rien savoir,
Une odeur de gaz me chatouille les narines
Les cigales se font plus insistantes dans mon oreille gauche, assourdissantes,
La lumière baisse lentement à gauche, puis à droite,
Des mouches s’agitent devant mes yeux,
Elles se transforment en étincelles de toutes les couleurs
Mon œil se ferme lentement,
Tout devient flou,
Tout devient flou aussi dans ma tête,
Où sont passés mes mots ?
Ma joue, que lui arrive-t-il ?
Des fourmis partent de mon pied gauche, de ma main gauche,
Elles remontent, ça pique….
Ma jambe, on dirait du carton, non du bois,
Mais comment déjà qu’on fait pour marcher ?
Mon bras, lui aussi,
Elle est où déjà ma jambe ?
C’est peut être ce truc inconsistant,
Allez je n’ai plus les mots mais il faut s’allonger je sais, je titube comme une femme saoule jusqu’à mon lit,
J’ai froid, j’ai soif,
Tout ce qui sort de ma bouche c’est
Wwwahhhh,
Faut être un mari aimant pour comprendre………………..
Il n’y a plus rien dans mon cerveau qu’un immense feu d’artifice,
Ma jambe, mon bras ont disparu
Et là, le pic à glace entre en scène,
Il prend le premier rôle,
Il vise ma tempe gauche,
Tout devient bouillie dans mon cerveau gauche,
Le couteau le rejoint par les coulisses,
Il s’attaque à ma nuque,
Mon mari me pose le masque à oxygène, des poches de glace, le masque sur les yeux,
Le temps s’étire, je ne pense plus,
Qui suis-je déjà ?
Je sombre
……………………
……………………..
Les mots reviennent syllabes par syllabes, les images sont de moins en moins floues,
La douleur décline comme étouffée,
Tout mouvement la ranime,
Le spectacle n’est pas terminé,
Mais là…… je sens tout,
Mon bras, ma jambe reprennent vie,
Ils sont engourdis pour encore un moment,
Je me lève pour aller aux toilettes en titubant, ouf ça marche
On dirait qu’un train de 6000 wagons m’est passé dessus…
Le spectacle est presque terminé.
Il faut récupérer. ……..

Jusqu’à la prochaine fois.

Le titre du spectacle :
MIGRAINE AVEC AURA HÉMIPLÉGIQUE.
Une expérience extraordinaire, inoubliable.

SABINE


Le jour se lève.

J’ouvre les yeux et malheureusement comme tous les matins depuis 14 ans la céphalée est là…

J’arrive toujours pas à comprendre comment c’est possible d’avoir mal à la tête sans interruption.

Peut-être qu’un jour je vais enfin revivre cette sensation de vide dans ma tête, mais en fait je ne sais même plus ce qu’on ressent quand on n’a pas mal à la tête.

Mon panneau il est là, il clignote rouge non stop, depuis 14 ans, j’ai mal.

Personne ne peut le voir.
Quand j’emmène ma fille à l’école, j’ai mal.
Quand je fais les courses, j’ai mal.
Une soirée avec des amis, j’ai mal.
Quand je suis sur mon pc, j’ai mal.
Quand je rigole, j’ai mal.
Et bien souvent cette céphalée me pousse doucement vers la migraine.

Chaque journée est un combat… je ne sais jamais si je vais tenir jusqu’au soir ou si je vais, comme toujours, devoir demander de l’aide pour qu’on s’occupe de ma fille.

J’ai longtemps lutté, aujourd’hui je le porte, c’est mon sac à dos. Quoi que je fasse où que j’aille il est là.

J’aime rire, jouer au pc, sortir, ma famille… et rien que pour ça je continuerai de me réveiller tous les matins avec mon sac à dos et je compte bien remuer ciel et terre pour qu’on nous aide.

On à tous un sac à dos, un sac que les autres n’ont pas.
Restons forts et courageux et ne cessons jamais de nous battre, ensemble on y arrivera !

LOREN


Bonjour, je m’appelle Thomas.

J’ai la chance de ne pas avoir de migraine et j’ai la chance d’avoir épousé une femme merveilleuse.

Elle, par contre, porte ce fardeau qu’est la migraine, avec aura hémiplégique… entre autres…

Mais qu’est-ce que c’est que cette maladie ? Elle est terriblement handicapante ! ! ! Des projets de vie ? Tout le monde en a ! Mais comment les concrétiser lorsque l’on est sans arrêt stoppé dans notre progression ?
Je réalise aujourd’hui que je fais partie de ceux qu’on appelle les « aidants ».
Mais je n’aide pas, je ne peux rien faire, attendre que ça passe, garder mon calme, ranger mes petits bobos à moi, ils sont insignifiants à côté de ceux de ma femme.

Et quelle femme !

Combien de fois a-t-elle songé à vendre son âme au diable pour ne plus souffrir ? Combien de fois a-t-elle songé à s’arracher ce foutu œil qui fait mal ?
Mais jamais elle ne baisse les bras. Pour moi, pour nos enfants, surtout, elle va toujours de l’avant, luttant contre ses douleurs, cherchant la lueur qui tous les jours la guide.

À toi ma femme, à vous, souffrant de ces saloperies de migraines, je vous donne mon respect !

Elle s’appelle Margo Daucé et a découvert récemment votre page et votre asso. Et déjà moralement ça fait du bien de ne pas être seule !

Courage à vous toutes et tous !